Produire et maîtriser son Energie
à bas coût,
c’est possible !
Entretien avec Christian Kabadi, Directeur Raccordement – VDN GROUP
Dans le débat énergétique français, les énergies renouvelables (ENR) sont encore parfois reléguées au second plan, perçues comme une alternative utile mais non suffisante, voire comme un supplément de coût ou un élément perturbateur. Cette perception ne reflète ni leur rôle actuel ni leur contribution réelle.
Les ENR ne sont plus des technologies d’appoint : elles constituent aujourd’hui un pilier de la production électrique, au même titre que le nucléaire ou l’hydraulique. Elles s’inscrivent dans les engagements climatiques de la France, participent à la sécurité d’approvisionnement, génèrent des emplois locaux, et répondent aux impératifs de souveraineté énergétique. Surtout, elles assument, sans soutien public sur les infrastructures, des investissements que d’autres filières historiques ont vu financés par l’État. À l’heure où il faut décarboner massivement et durablement, leur légitimité n’est plus à démontrer : elle doit être pleinement reconnue.
Le raccordement : pierre angulaire de l’électricité propre
Dans l’imaginaire collectif, le raccordement électrique est un simple détail technique, voire une inconnue dans l’équation. Dans la réalité du développement énergétique, c’est une opération complexe, coûteuse et déterminante. Sans raccordement, pas de production injectée dans le réseau, pas d’énergie disponible pour les territoires.
“Maîtriser son énergie, c’est maîtriser son raccordement”, insiste Christian Kabadi. Et pour cause : 50 % des projets ENR en file d’attente sont retardés à cause de difficultés de raccordement. Ces délais induisent des surcoûts massifs : jusqu’à 70 % des dépassements budgétaires constatés sur un projet, proviennent d’aléas de raccordement.
Conséquence : des modèles économiques déstabilisés, des investisseurs méfiants, et des projets menacés. “Les projets ne doivent pas seulement être bien conçus. Ils doivent être, solides, fiables”, rappelle-t-il.
Tout projet d’énergies renouvelables doit s’assurer de ses conditions de raccordement, des contraintes du réseau, des délais et coûts potentiels”, explique Christian Kabadi. Base de données, veille réglementaire, indicateurs internes : tout est conçu pour dérisquer les projets et rendre la décision plus rapide et plus sûre.
Qui paie le raccordement ? Les ENR.
Les producteurs d’énergies renouvelables supportent directement les coûts liés au raccordement de leurs installations. Ils prennent en charge :
- Les études techniques préalables.
- La construction des lignes de raccordement.
- La mise à niveau des infrastructures locales (si besoin).
- Les coûts d’accès au réseau (versement à RTE ou Enedis).
Aujourd’hui, plus de 90 % des nouvelles infrastructures de raccordement en France sont dues aux ENR, qui assurent le coût de développement.
Pilotables, fiables, innovantes : les ENR dépassent les clichés
L’un des caractères propres des ENR est leur variabilité. C’est un fait souvent repris sous le terme « intermittent » pour dénoncer un potentiel manque de disponibilité constante et de perturbation sur les réseaux.
Aujourd’hui les ENR sont pilotables. Le développement du stockage, de l’automatisation des réseaux et des technologies de pilotage intelligent change la donne.
Ces avancées permettent de fournir des services de flexibilité, et interagir avec le réseau en temps réel. Le stockage permet de libérer de la capacité au bon moment, au bon endroit, avec un temps de réponse à la seconde prés.
Ainsi, les ENR ne sont plus de simples producteurs, mais des gestionnaires actifs de l’énergie, adaptés aux besoins du système électrique. Ce sont aussi des innovateurs : le raccordement devient un champ d’amélioration continue, de performance, et de réduction des coûts pour la collectivité.
Une électricité incontournable
Dans un monde en totale mutation, se passer d’une électricité pouvant être produite rapidement sur notre sol, à bas coût, en quantité infinie sans aucune condition géopolitique serait une hérésie profonde.
Une vision à court terme n’a jamais profité à l’économie d’un pays surtout lorsque celui-ci veut relancer ses industries, électrifier ses transports et investir dans les nouvelles technologies comme l’intelligence artificielle. Nous allons avoir besoin d’électricité décarbonée rapidement et non dans 15 ans.
« Nos objectifs énergétiques doivent être ambitieux et ils seront atteignables si l’on donne aux professionnels les moyens et la liberté de développer leurs projets. » conclut Christian Kabadi.
Il ne s’agit pas d’opposer les filières, mais de reconnaître équitablement la contribution de chacun. Les ENR financent, innovent, et participent. Elles doivent être considérées à part entière comme une force pour notre territoire.